Portrait : Alice Rascoussier

NewVo fait le portrait : Alice Rascoussier

1 – Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis un mélange Nord/Sud ayant atterri à Paris à l’âge de 10 ans dans le 11ème arrondissement. Après des études en économie à paris 1, j’ai travaillé comme consultante à l’époque de la mise en place de la loi Aubry (les fameuses 35h) pour la CFDT et des entreprises de différents secteurs d’activité.

Mon esprit « service public » m’a fait entrer dans la grande famille ANPE il y a 15 ans, j’y suis restée beaucoup plus longtemps que je ne le pensais au départ. Aujourd’hui je travaille pour le réseau « spectacle-audiovisuel », je suis formatrice pour les conseillers et j’ai développé une expertise sur la création d’activité. J’allie mon amour de la musique et des arts en général à mon métier, c’est très agréable.
2 – D’où vient votre engagement politique notamment à Saint-Denis
Mon premier souvenir politique c’est la Bastille un certain 10 mai 81. L’arrivée au pouvoir de la gauche a été un évènement qui m’a marqué non pas parce que j’en mesurais toute la portée, j’étais trop jeune pour ça, mais par la joie des miens et de toute une génération qui était vraiment palpable. La place de la Bastille c’est toute ma jeunesse.
Il y a eu ensuite la loi Devaquet, j’étais en classe de 1ere et l’une des seules avec les terminales à avoir entrainé mes camarades dans cette aventure. J’ai eu une adolescence assez rebelle mais avec de bons résultats scolaires. Ce n’était donc pas sans déplaire dans ma famille. Je me souviens de mon grand-père qui m’appelait « ma petite Martine », nous avions souvent des discussions sur l’actualité à bâton rompu. A la différence de beaucoup d’élus du PS je ne suis pas passée par la case du syndicalisme étudiant, je n’ai donc pas été formatée. C’est ma force je crois. J’ai choisi des études en lien avec ma passion pour la politique économique. J’ai commencé à fréquenter sérieusement le PS avec la défaite de Jospin, je me souviens encore de son meeting à Bercy…et du soir des résultats. J’ai milité quelques années dans le 19eme puis avec mon mari lui aussi militant nous avons choisi de nous installer à Saint-Denis en 2003.
S’installer à Saint-Denis était un choix économique, vu les prix sur Paris nous ne pouvions acheter qu’en banlieue mais nous étions séduits par le dynamisme et la jeunesse de cette ville. J’ai demandé une affectation à l’agence interprofessionnelle et c’est par mon travail que je me suis constituée l’essentiel de mon réseau. Sont venus ensuite les enfants et la question de rester ou non. Nous sommes restés parce que nous croyons en cette ville attachante par son multiculturalisme.
En 2008 j’ai été élue suppléante de Mathieu Hanotin. Je suis conseillère municipale depuis 2 ans maintenant.

3 – Quel est votre rôle dans l’opposition ?

Saint-Denis a la particularité de n’avoir que des conseillers de gauche. Les socialistes ont fait le choix de constituer une liste concurrente à la mairie sortante pour sortir d’un système depuis longtemps établi et donner un nouveau souffle à cette ville.
Nous sommes 55 conseillers dont 12 pour mon groupe « l’ambition à gauche » alors que nous avons pratiquement obtenu la moitié des suffrages. De ce point de vue le système de représentation mériterait d’évoluer. L’opposition ne participe pas au processus de décision. Le conseil municipal entérine des décisions prise en bureau municipal. Notre rôle est donc d’informer la population et de l’alerter. Les conseillers municipaux sont par ailleurs des relais auprès des autres élus que sont les conseillers généraux, les conseillers régionaux et les députés. Je suis par ailleurs membre de différentes associations comme Vélo à Saint-Denis, le vélo est mon mode de déplacement favori, et représentante des élèves et parents d’élèves du conservatoire. C’est important de pouvoir être active dans ces structures pour avoir d’autres leviers d’action et être utile à la collectivité.
Le fil rouge de mon action politique à Saint-Denis c’est Simballa, un petit garçon de l’âge de mon fils. Sa famille habite l’hôtel d’urgence situé dans ma rue au pied du Stade de France. Plusieurs fois les hébergés ont été menacés de changer d’hôtel. Malheureusement aucune solution durable n’a été trouvée pour eux. Cette situation représente par ailleurs un énorme cout pour la collectivité. En attendant ils sont là depuis une dizaine d’années grâce à l’action conjointe des élus et militants associatifs dont je fais partie. Cette stabilité leur a permis de s’intégrer mais les mamans ont tendance à rester entre elles, c’est un frein à l’apprentissage pour leur enfants. J’aimerais que le multiculturalisme ne soit pas un vain mot sur notre territoire.

 

Je suis persuadée que c’est par les échanges artistiques, entre autres, que le mélange se fera. C’est pourquoi j’attache beaucoup d’importance à ce que nous ayons un conservatoire digne de ce nom à Saint-Denis ainsi qu’une salle polyvalente, c’est ma bataille…ce sera mon programme pour les prochaines municipales en tous cas.

4 – Pour vous, à Saint Denis, comment vivez-vous les questions de laïcité et de vivre ensemble ?
C’est une question d’actualité et que je ne me posais pas vraiment avant de venir vivre ici. Pourtant je venais d’un quartier populaire le 19ème arrondissement assez proche sociologiquement. C’est surtout avec l’école et les enfants que ces questions surgissent.
En maternelle le mélange se fait assez bien mais dès le primaire la plupart des parents qui en ont la possibilité dans notre ville choisissent le privé. C’est presque un choix militant que de laisser ses enfants dans le public. Les miens ont donc souvent été les seuls « blancs » dans leur classe, ce qui pose le problème de la mixité.

Curieusement les communautés ne se mélangent pas ou peu dans notre ville. Dès le plus jeune âge c’est palpable.

La question de la religion vient très vite chez les petits car ils se posent des questions sur la vie, la mort, ce qui est juste ou pas. Ils sont très influençables et c’est toujours désarmant d’entendre son enfant dire qu’il sera « puni par dieu », qu’il ne doit pas manger de porc ou autre alors qu’il ne s’agit pas de votre culture. Je pense aussi à cette maman d’élève qui s’était permis de me dire dans une réunion de parent d’élèves qu’il ne fallait pas introduire la politique dans l’école alors qu’elle portait le voile…personnellement je ne me sentais pas représentée par elle, la religion instaure des barrières entre nous. Devons-nous accepter que des mamans portent le voile au sein des établissements scolaires ? C’est une question délicate car nous touchons aux libertés individuelles. La religion est une question intime et devrait le rester. Il faut beaucoup d’humanité pour dépasser ces clivages et une vraie volonté politique pour les surmonter.
Et puis il y a eu les attentats de Charlie. Les personnels enseignants et d’éducation étaient mal préparés à ce type d’évènement. Il y a eu des maladresses et des ratés. Je pense par exemple à la minute de silence non respectée dans certains établissements faute de consigne claires ou par manque de coordination entre l’école et les activités périscolaires. Les dionysiens ont ensuite été au premier rang le 13 novembre et là une vraie solidarité s’est créée. Nous ne voulons pas de cette mauvaise image que les médias veulent nous coller.

Saint-Denis est une ville ancienne, attachante par son histoire mais aussi pleine d’espoir pour notre jeunesse si nous savons lui en donner les moyens.

Slimane
Slimanehttps://www.facebook.com/slimane.tirera
Dirigeant fondateur des 100 Voix

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